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Artigos-->Em qualquer língua, é sempre bom ler Saramago -- 30/09/2001 - 18:24 (Fernando Tanajura) Siga o Autor Destaque este autor Envie Outros Textos
[Peço encarecidamente a quem conseguir o original do texto em Português remetê-lo para: FMenezes@aol.com]

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La plus criminelle des inventions, par José Saramago



Quelque part en Inde. Une rangée de pièces d artillerie. A la bouche de

chacune d elles est attaché un homme. Sur la photo, au premier plan, un

officier britannique lève son épée et s apprête à ordonner la mise à feu. Il

n existe aucune image des effets produits par l explosion. Mais même

l imagination la plus bornée peut appréhender têtes et torses parsemant le

champ de tir, restes sanguinolents, viscères, membres amputés.

Les hommes étaient des rebelles.



Quelque part en Angola. Deux soldats portugais soulèvent par les bras un Noir

qui n est peut-être pas mort, un autre soldat saisit un sabre et se prépare à

lui séparer la tête du corps. C est la première photographie. Dans la

deuxième - cette fois-ci il y a une deuxième photo -, la tête a déjà été

coupée, elle est embrochée sur un bâton, et les soldats ricanent. Le Noir

était un guérillero.



Quelque part en Israël. Alors que des soldats israéliens immobilisent un

Palestinien, un autre militaire casse avec un marteau les os de sa main

droite. Le Palestinien avait jeté des pierres.



Etats-Unis d Amérique, ville de New York. Deux avions commerciaux

nord-américains détournés par des terroristes au nom de l intégrisme

islamique se jettent contre les tours du World Trade Center et les

détruisent. Par le même procédé, un troisième avion provoque d énormes dégâts

à l édifice du Pentagone, siège du pouvoir belliqueux des States. Les morts,

enterrés sous les décombres, réduits en miettes, volatilisés, se comptent par

milliers.



Les photos de l Inde, de l Angola et d Israël nous saisissent d horreur, les

victimes nous sont révélées à l instant même de la torture, de la lancinante

attente de l agonie, de la mort ignoble. A New York, tout semblait irréel au

départ, épisode à répétition et sans nouveauté d une catastrophe

cinématographique de plus, extrêmement réussie, due aux talents du

spécialiste des effets spéciaux, mais débarrassée des râles, des jets de

sang, de la viande écrasée, des os triturés, de la merde.



En réalité, l horreur, tapie comme un animal immonde, traquait notre

stupéfaction pour nous sauter à la gorge. L horreur a dit pour la première

fois "Me voilà" quand des individus se sont jetés dans le vide comme s ils

venaient de choisir leur propre mort. Dorénavant l horreur surgira, à chaque

instant, du déplacement d une pierre, d un pan de mur, d une tôle en

aluminium tordu, et ce sera une tête méconnaissable, un bras, une jambe, un

ventre défait, un thorax écrabouillé.



Mais même tout cela est répétitif et monotone, du déjà-vu, en quelque sorte,

à travers les images qui nous ont été présentées de ce

Rwanda-d un-million-de-morts, de ce Vietnam cuit au napalm, de ces exécutions

dans des stades peuplés de gens, de ces lynchages et passages à tabac de

soldats irakiens enterrés vivants sous des tonnes de sable, de ces bombes

atomiques qui ont rasé et calciné Hiroshima et Nagasaki, de ces fours

crématoires nazis vomissant des cendres, de ces camions qui déchargent des

cadavres comme si c était de l ordure.



On mourra toujours de quelque chose. Mais on a perdu toute notion de ce que

les êtres humains ont pu inventer pour faire mourir d autres êtres humains.



Une d entre elles, la plus criminelle, la plus absurde, celle qui heurte la

raison la plus ordinaire, c est celle qui, depuis le commencement des temps

et de la civilisation, ordonne de tuer au nom de Dieu.



Il a été déjà dit que les religions, toutes sans exception, n ont jamais

servi à rapprocher et réconcilier les hommes, bien au contraire. Elles ont

été et continuent d être la cause de souffrances indicibles, de carnages, de

violences physiques et spirituelles monstrueuses constituant l un des plus

ténébreux chapitres de la misérable histoire humaine. Ne serait-ce qu en

signe de respect pour la vie on devrait avoir le courage de proclamer en

toutes circonstances cette vérité évidente et démontrable.



Pourtant, la plupart des croyants, quelle que soit leur religion, non

seulement feignent de l ignorer, mais se rebellent, courroucés et intolérants

vis-à-vis de ceux pour qui Dieu n est plus qu un nom, rien qu un nom, un nom

que, par peur de mourir, on lui a attribué un jour et qui viendrait entraver

la marche d une humanité nouvelle. En échange, on nous a promis des paradis

et menacés d enfers, aussi faux les uns que les autres, insultes effrontées à

l intelligence et au bon sens que nous avons eu tant de difficultés à faire

naître.



Nietzsche a dit que tout était permis si Dieu n existait pas, et moi je

réponds que c est justement à cause et au nom de Dieu que tout a été permis

et justifié, surtout le pire, surtout le plus horrible et le plus cruel.

Pendant des siècles, l Inquisition, comme aujourd hui les talibans, était une

organisation terroriste qui s acharnait à pervertir des textes sacrés qui

devraient mériter le respect de ceux-là mêmes qui prétendaient y croire, un

monstrueux pacte conjugal entre la religion et l Etat contre la liberté de

conscience et contre le plus humain des droits : le droit de dire "non", le

droit à l hérésie, le droit de choisir, puisque c est tout ce que le mot

hérésie signifie.

Et cependant, Dieu est innocent. Innocent comme quelque chose qui n existe

pas, qui n a pas existé ni n existera jamais, innocent d avoir créé l univers

pour y placer des êtres capables de commettre les pires crimes et de se

justifier aussitôt en disant que ce sont les célébrations de son pouvoir et

de sa gloire, pendant que les morts s accumulent, ceux des tours jumelles à

New York, et tous les autres qui, au nom d un Dieu devenu assassin par la

volonté et l action des hommes, couvrent et recouvrent de terreur et de sang

les pages de l Histoire.



Les dieux, je crois, n existent que dans le cerveau humain, prospèrent ou

dépérissent à l intérieur même de l univers qui les a inventés, mais le

"facteur Dieu", lui, est présent dans la vie comme si effectivement il avait

été son maître et son seigneur. Ce n est pas un dieu, mais le "facteur Dieu"

qui s exhibe sur les dollars papier et s affiche sur des pancartes qui

demandent la bénédiction divine de l Amérique (celle des Etats-Unis, pas

l autre...). Et c est à travers le "facteur Dieu" que le dieu islamique s est

incarné. Il a jeté contre les murs du World Trade Center les avions de la

révolte contre le mépris et de la vengeance contre les humiliations.

On dira qu un dieu a semé le vent et un autre récolté la tempête. C est

possible, c est même certain. Mais ce n étaient pas eux, pauvres dieux non

coupables, c était le "facteur Dieu", celui qui est le même chez tous les

êtres humains où qu ils soient et indépendamment de toutes croyances, celui

qui a intoxiqué la pensée et ouvert la porte aux intolérances les plus

sordides, celui qui ne respecte que ce qu il ordonne de croire, celui qui,

présumé avoir fait de la bête un homme, a fini par faire de l homme une bête.



Au lecteur croyant (quelle que soit sa religion) qui a réussi a surmonter la

répugnance que ces mots pouvaient lui inspirer, je ne demande pas de devenir

athée comme celui qui les a écrits. Simplement, je le prie de comprendre, par

le biais de la sensibilité si cela s avère impossible par celui de la raison,

que si Dieu il y a, il est unique et que, dans son rapport avec lui, ce qui

importe le moins, c est le nom qu on a appris à lui donner. Et qu il se méfie

du "facteur Dieu".

L esprit humain ne manque pas d ennemis, mais celui-là est l un des plus

obstinés et corrosifs.



Comme cela vient d être démontré et comme, malheureusement, cela risque de

l être encore.



José Saramago est écrivain, Prix Nobel de littérature 1998.Traduit du

portugais par Térésa Maria Ovidio.



• ARTICLE PARU DANS L EDITION DU 22.09.01



http://www.lemonde.fr/article/0,5987,3232--223028-,00.html



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